La marquise de Sévigné, Madame de Sévigné, Marie de Rabutin-Chantal, tant de patronymes pour désigner une femme qui illumina le Grand Siècle de son génie littéraire. Chez Commines nous sommes attachés à cette figure d’envergure, ne serait-ce que parce qu’elle est la cousine chérie du Comte de Bussy : le tout premier héros de nos parcours de visite !
Une cuillère en argent dans la bouche ?
Marie de Rabutin-Chantal naît au cœur de l’hiver 1626, place des Vosges à Paris (sympa !). Son père et sa mère appartiennent tous deux à de grandes familles de la noblesse française, et on peut dire que la petite fille hérite d’une flopée d’ancêtres flamboyants – comme sa grand-mère la très sainte Jeanne de Chantal. Mais très vite les choses se compliquent pour Marie, son père Celse-Bénigne meurt au combat face aux Anglais pendant le siège de l’île de Ré. À l’âge de sept ans, elle perd sa mère et sera successivement éduquée par ses tantes et sa grand-mère. Malgré son statut d’orpheline, Marie connaît une enfance choyée et heureuse. Elle reçoit une solide éducation religieuse et maîtrise rapidement le latin, l’italien et l’espagnol en plus de sa langue maternelle.
À 18 ans, elle épouse Henri de Sévigné – ne soyez pas choqué c’est la norme à cette époque – avec qui elle aura deux enfants Françoise et Charles. Veuve moins de sept ans plus tard, elle mène sa vie comme elle l’entend dans les salons littéraires les plus courus de la capitale et à la cour du roi Louis XIV dont elle nous livre tous les secrets.
Françoise, la grande passion de sa vie.
La grande majorité des lettres de la marquise qui nous sont parvenues sont à l’attention de sa fille Françoise devenue à Comtesse de Grignan en 1669. Est-ce parce que la Marquise n’a que peu connu sa mère qu’elle adore littéralement sa fille ? Impossible à dire, pour autant le lien fusionnel qui existe entre les deux femmes durera jusqu’à la mort de la marquise en 1796. Au fil des lettres, la figure maternelle de Madame de Sévigné et sa figure de femme de lettres se mêlent pour donner naissance à l’épistolière que nous connaissons. La raison d’être de ces lettres c’est avant tout le désir de la marquise d’entretenir sa relation avec sa fille malgré son récent mariage ; et le besoin de combler le vide laissé par son absence.
Une plume fine et juste.
Le caractère privé des lettres de madame de Sévigné ne l’empêche pas de porter une très grande attention à son style. Au XVIIème siècle, la littérature explore le territoire de l’individualité dans la foulée d’un mouvement qui voit les belles lettres s’étendre à la sphère privée. Les sujets féminins prennent eux-aussi de plus en plus d’importance : la grande amie de la marquise, Madame de Lafayette, est une auteur reconnue et tient l’un des salons littéraires les plus courus de l’époque. Dans ce courant littéraire foisonnant, Madame de Sévigné s’attache donc à définir les contours d’un nouveau style à la fois intimiste et recherché. Elle écrira à sa fille ce qu’elle considère être les qualités d’une bonne épistolière : tendresse, simplicité, vérité, et vivacité.
Pour se donner l’illusion d’une présence de sa fille, la marquise ne lésine pas sur les détails et se pose en chroniqueuse de la cour du Roi Soleil. Des siècles plus tard, elle est encore célébrée comme une des plus grandes ambassadrices de notre langue. Certains de ses bons mots sont toujours d’actualité : « Pour juger combien nous importunons en parlant de nous, il faut songer combien les autres nous importunent quand ils parlent d’eux ».